Il est fréquent d’avoir la sensation de ne pas avoir agi de manière efficace, alignée avec soi-même ou sous le coup de l’émotion. Il est probable que la situation vécue ne réponde pas, alors, pas à un ou plusieurs de nos besoins. Comment faire pour éviter que cela se reproduise ? Commencer par (1) identifier vos besoins et (2) aller chercher en vous ou dans son environnement des stratégies pour mieux y répondre en situation.
Aujourd’hui, je vous propose d’évoquer les stratégies permettant de répondre à vos besoins dits “fondamentaux”. Comme je vous l’expliquais dans un précédent article, je fais le choix de vous parler du paradigme des 12 besoins de Jean-Pierre POURTOIS et Huguette DESMET publiée en 2002 dans l’ouvrage “L’éducation postmoderne”. Sa représentation non-hiérarchisée et multidimensionnelle (affective, cognitive, idéologique, sociale) me parle davantage.

Comment répondre aux besoins d’ordre affectif ?
Chacun de ces besoins cherche à solliciter l’autre et son environnement pour faire lien, pour renforcer le sentiment d’affiliation et faire groupe. Nous savons bien que l’être humain est un animal social et que même la personne la plus casanière ne peut pas vivre seule. Simplement, car l’être humain a besoin de l’autre pour être regardé. Certains considèrent que le début du sentiment d’existence démarre par le regard de l’autre posé sur soi.

- Besoin d’attachement
D’autant plus présent avant 3 ans, il se manifeste à tous les âges. Les liens d’attachement sécurisant jouent un rôle clé dans la construction de l’individu et de son estime.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’attachement ?
– Multiplier le contact physique, les gestes et mots de tendresse
– Signifier les ressemblances au sein d’une famille
– S’octroyer des moments de détentes seul.e ou accompagné.e
- Besoin d’acceptation
L’acceptation s’exprime par la tolérance, l’accueil voire la valorisation des différences. À l’inverse, le rejet et l’abandon prônent la mise à distance.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’acceptation ?
– Reconnaître le résultat et l’effort
– Accueillir les / ses défauts
– Accorder un espace à l’autre et accepter son envie d’être seul.e
– Impliquer l’autre dans la réflexion en acceptant son point de vue
- Besoin d’investissement
Faire émerger et exister son projet personnel, qu’il s’agisse d’une profession, d’un loisir, d’une passion peut, parfois, entrer en discorde avec ce que les autres vous souhaitent voire ont planifié pour vous. Les parents et la société peuvent faire peser une forte pression remplie d’injonction, parfois par projection d’insatisfactions vécues.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’investissement ?
– Écouter les envies et désirs dans le cadre d’un projet ou d’une activité
– Encourager l’autre à faire son choix loin des injonctions
– Identifier ses compétences, ses forces et ses ressources
Comment répondre aux besoins d’ordre cognitif ?
Les modélisations d’intelligence s’ouvrent aux intelligences multiples. Le versant cognitif reste, néanmoins, important dans la construction et le développement de l’identité d’un individu. Pourquoi ? Car cela lui permet d’être en contact et de penser son environnement dans une dynamique où il y ressent de l’accomplissement. C’est un terme qui sonne familier en termes de besoins, car Maslow le positionnait déjà dans sa pyramide. Pour lui, l’accomplissement rime avec réalisation de soi, épanouissement et expression de son potentiel. Ici, il est plutôt question de créativité, mise en mouvement cognitive et apprentissage. Soit une dynamique plus concrète et moins existentielle que celle de Maslow.

- Besoin de stimulation
D’autant plus présent avant 3 ans, il est présent à tout âge. Le besoin de grandir et de se développer, derrière le besoin de stimulation, peuvent être remplis dès lors que l’environnement vous incite à développer certaines compétences. Il est d’autant plus nécessaire pour élargir le champ de curiosité et la zone de confort propre à chaque individu.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de stimulation ?
– Faire réfléchir plutôt que conseiller l’autre en contexte de résolution de problème
– Se challenger de manière progressive, pas à pas
– Observer et s’ouvrir à des sujets nouveaux
- Besoin d’expérimentation
La mise en mouvement est une dynamique clé dans l’apprentissage. Elle se base sur la motivation intrinsèque et extrinsèque et impacte la confiance en soi selon le résultat obtenu, la perception de réussite et le renforcement associé. Un environnement et des liens interpersonnels perçus comme sécurisants permettront une meilleure expression du besoin d’expérimentation.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’expérimentation ?
– Découvrir en prenant plaisir, avec un aspect ludique
– Aménager du temps et/ou un lieu pour l’expérimentation
– Écouter ses freins et peurs tout en maintenant “aller vers”, sauf en cas de danger réel
- Besoin de renforcement
C’est la manière dont l’environnement réagit à l’action réalisée, liée aux normes et à l’atteinte de l’objectif initialement prévu. Le renforcement positif consolide le comportement souhaité mis en œuvre, là où le renforcement négatif sanctionne un comportement indésirable. Ils peuvent être vicariants, externes ou internes.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de renforcement ?
– Être attentif à ce qui fonctionne et ancrer l’habitude du R positif (plus éducatif que le renforcement négatif)
– Privilégier les R non-matériels pour favoriser la motivation intrinsèque
– Donner du sens et observer les impacts pour appeler une action de réparation si nécessaire
Comment répondre aux besoins de valeurs ?
Les valeurs sont acquises au fil de la vie. Leur apprentissage prend naissance dès l’enfance dans l’éducation, la scolarité, la culture et sera intériorisé au fil du développement. Elles guideront l’individu dans ses choix que ce soit dans son orientation professionnelle, dans ses relations choisies (amicales, amoureuses), dans les décisions de vie (union, parentalité ou non, emménagement…), dans sa communication et posture avec les autres ou dans sa manière de s’organiser et de résoudre des problèmes plus ou moins complexes. Bref, dans pas mal de sphères ! L’enjeu le plus fort en termes de valeur est l’authenticité qui s’exprime dans une dynamique de l’être plutôt que du paraître.

- Besoin d’humanisation – Le bien et le bon
Il est autant question de morale (le bien) que d’éthique (le bon) dans les relations. L’humanisation vient mettre en jeu pléthores de valeurs dont certaines auront été davantage intériorisées que d’autres telles que la justice sociale, l’humilité, le respect, la politesse, l’honneur, l’égalité et j’en passe !
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’humanisation ?
– En cas de dilemmes, réfléchir sur l’ensemble des conséquences plutôt que sur la bonne solution
– Discuter de l’acceptable / inacceptable, partager ses limites
– Rechercher la réparation pour rétablir le bon
- Besoin de vérité – Le vrai
La vérité n’est pas absolue mais relative. Il serait illusoire d’être certain d’être dans le vrai alors que la vie est avant tout une question d’acceptation du risque et de l’incertitude.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de vérité ?
– Se remettre en question, car deux vérités opposées restent vraies
– Distinguer les faits (objectif) et les ressentis (subjectif) lors d’un échange / désaccord
– Pardonner et se pardonner d’avoir menti
- Besoin d’esthétisme – Le beau
Le beau est bien une valeur “d’être” lorsque le comportement pour y accéder est tourné vers l’enrichissement (de soi, du partage à l’autre) et non la démonstration (d’une compétence ou d’un statut).
Que faire concrètement pour répondre à un besoin d’esthétisme ?
– Se connecter au présent par la pleine conscience
– Être attentif, contempler et valoriser les imperfections
– S’éveiller par l’art et par le contact avec la nature
Comment répondre aux besoins d’ordre social ?
La dimension sociale est particulièrement en lien avec la dimension affective. La première permet de développer une autonomie sociale, là où la seconde permet l’affiliation à un groupe. Après s’être intégré, il sera nécessaire d’analyser et de partager les codes sociaux (règles, préférences, manifestations de l’appartenance…) de son groupe pour maintenir sa cohérence dans le temps ou changer de groupe social. Pour comprendre le fonctionnement de son groupe, l’individu devra en comprendre le cadre et renforcer ses relations.

- Besoin de communication
Penser que l’autre ne verra pas qu’il vous agace simplement en ne le lui disant pas explicitement est un leurre. L’implicite s’exprime et se ressent tout autant dans les relations par le non-verbal et le para-verbal.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de communication ?
– Exprimer ses émotions et besoins en disant “je” plutôt que des critiques en disant “tu”
– Nuancer les observations plutôt que d’exprimer un “tout” ou “rien” ou de généraliser
– Être autant attentif au message émis et au message reçu
- Besoin de considération
Être considéré passe d’abord par le fait d’être reconnu tel que vous êtes, comme un être unique et différent. C’est le regard de l’autre qui permet, ensuite, de vous considérer vous-même et de construire votre confiance en qui vous êtes.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de considération ?
– Être attentif aux réalisations, aux besoins, aux ressentis de l’autre
– Responsabiliser, au-delà de partager des attentes ou objectifs
– Soutenir l’autre dans l’effort fourni ou l’échec en reconnaissant les compétences et ce qui est bien réalisé
- Besoin de structures
C’est le besoin qui, s’il n’est pas satisfait, impacte toutes les autres dimensions : (affective) la porosité/envahissement des limites exposent à l’insécurité psychique et à la difficulté de se lier aux autres ; (cognitive) le manque de règles freine l’accomplissement ; (idéologique) sans interdit difficile de construire un rapport à la vérité/une morale/une éthique ; (sociale) sans cadre, il n’est plus question d’autonomie, mais d’indépendance et de débrouillardise.
Que faire concrètement pour répondre à un besoin de structures (les limites, le cadre) ?
– Poser des limites dans une visée souple de “ni trop, ni trop peu”
– Évoquer les conséquences quand une règle est fixée ou rappelée
– Être ouvert à la discussion en cas de cas individuel pour adapter le cadre sans desservir le collectif
En conclusion
1. Toutes les stratégies évoquées dans cet article sont utiles dans l’interaction à l’autre et le sont également valables vis-à-vis de soi !
2. Avant d’attendre des autres qu’ils répondent à vos besoins, questionnez-vous sur les besoins auxquels vous avez déjà du mal à répondre
3. Il n’est pas possible de répondre complètement à tous ces besoins. En revanche, si vous sentez un état de mal-être demandez-vous lequel de ces besoins semblent le plus manquer de réponse dans votre quotidien.
Envie de continuer à en apprendre sur vous-même ?

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